Industrie, distribution : syndicats et patronat s’inquiètent d’une accélération des plans sociaux

“Un raz-de-marée”: syndicats et patronat craignent une accélération des plans sociaux dans l’industrie et au-delà, compte tenu des dernières annonces de suppressions de postes dans l’automobile et la sidérurgie, mais aussi de l’incertitude politique autour du gouvernement de Michel Barnier.La secrétaire générale de la CGT Sophie Binet a tiré mercredi la sonnette d’alarme, pronostiquant une “accélération très forte de la dégradation de la situation” en matière de plans sociaux, dans l’industrie principalement mais également dans d’autres secteurs.Cela fait six mois que les chiffres qu’elle égrène ne cessent de gonfler, au gré des annonces de Michelin, ArcelorMittal, Auchan, pour ne citer que les plus connus.Alors qu’elle évoquait début novembre près de 200 plans sociaux et 150.000 emplois menacés par une “violente saignée industrielle”, Mme Binet évoque désormais “près de 250 plans de licenciements en préparation, concernant entre 170.000 et 200.000 emplois”, dans un entretien au journal Les Echos, en amont d’une conférence de presse sur l’industrie, mercredi.Ce décompte, réalisé à partir des remontées des militants, augure pour elle un “un raz-de-marée” dans les mois à venir : “ces plans ont lieu surtout dans les grandes entreprises, les restructurations risquent d’avoir des conséquences sur les petits sous-traitants, beaucoup plus nombreux”, a-t-elle averti.Son homologue de la CFDT Marylise Léon a, elle, évoqué mardi “une vague de destructions d’emplois”, estimant à “au moins 23.000″, le nombre d’emplois concernés pour le seul mois de novembre, sur RTL.”L’environnement est certes plus exigeant et plus difficile qu’il y a un an, c’est clair”, concède Alexandre Saubot, président de France Industrie, qui représente les entreprises et les organisations professionnelles du secteur industriel, à l’AFP.Mais il estime que Sophie Binet force un peu le trait: “si on veut avoir une appréciation globale sur l’industrie, il faut aussi parler des choses positives, il y a encore des projets qui continuent”, a-t-il assuré.Pour la ministre du Travail, Agnès Panosyan-Bouvet, certaines mutations économiques profondes “s’accélèrent à la faveur de réglementations européennes ou du contexte géopolitique”. “Les impacts sont considérables. Nous devons accompagner nos entreprises et les travailleurs dans ces mutations”, a-t-elle déclaré mercredi à l’AFP.”Il y a les grosses entreprises dont les restructurations font la une des journaux mais il y a aussi tous leurs sous-traitants, leurs fournisseurs”, a-t-elle relevé. “Il est nécessaire d’anticiper, et de se préparer les compétences dont nous aurons besoin demain”, a-t-elle jugé.- La crainte d’une chute du gouvernement -“Nous sommes dans une phase de transition: certains emplois sont détruits, c’est vrai”, a concédé son collègue de l’Industrie, Marc Ferracci, ajoutant qu'”en même temps, on constate que de nouveaux emplois sont créés dans d’autres secteurs”, dont certains, comme l’industrie verte, sont “en croissance”, a-t-il déclaré à l’AFP.Pour la sidérurgie, il préconise une réponse européenne d’urgence et présentera jeudi à Bruxelles les propositions de la France pour protéger le marché européen et soutenir la décarbonation.Mais, a prévenu le président de la CPME François Asselin, la chute du gouvernement de Michel Barnier, menacé de censure, provoquerait un nouveau choc de nature à mettre en péril les entreprises et l’emploi.”Si jamais le gouvernement saute (…) on va se retrouver dans la même situation qu’après la dissolution”, a déclaré M. Asselin sur RMC, avec des “semaines et des semaines encore” avant qu’un nouveau gouvernement “reprenne le budget en main”, une situation “absolument pas souhaitable pour les entreprises” qui ont besoin de “visibilité”, selon lui.Ce serait “catastrophique”, a-t-il assuré, car “pendant ce temps-là, les entreprises arrêtent d’investir, d’embaucher, et les défaillances d’entreprises augmentent”.Alexandre Saubot, lui, met en garde contre une réduction des allègements de charges telle qu’envisagée par le Premier ministre Michel Barnier, qui “se traduira par une augmentation du coût du travail en 2025”.Au-delà du contexte politique, Mme Binet tire également à boulets rouges sur la politique de l’offre menée depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, “un naufrage politique”, selon elle, qui appelle à “de véritables états généraux de l’industrie pour tout remettre à plat”.”C’est tout le programme industriel et économique qu’il faut revoir”, renchérit Cyril Chabanier, président de la CFTC à l’AFP, demandant notamment “un moratoire sur les aides qui sont distribuées, le remboursement d’aides sur les entreprises qui ferment et qui ont été biberonnées aux aides publiques”.