Le Sénat s’est saisi lundi du projet de budget du gouvernement pour 2025, prêt à soutenir l’essentiel des mesures de ce texte à haut risque pour Michel Barnier, toujours menacé de censure par le Rassemblement national.Pour valider un budget proche de son projet initial, le Premier ministre, privé de majorité à l’Assemblée, compte sur la chambre haute, où sa coalition gouvernementale est largement majoritaire. Sur Public Sénat, le ministre du Budget Laurent Saint-Martin a dit toujours espérer aboutir à un effort budgétaire “autour de 60 milliards”. Mais “si c’est un petit peu moins, ce n’est pas très grave”, quitte à ce que le déficit atteigne “un petit peu plus” que les 5% du PIB visés. Rejeté en première lecture à l’Assemblée, c’est dans sa version initiale, celle soumise par le gouvernement, que le budget est arrivé au palais du Luxembourg: les sénateurs ont entamé lundi l’examen des recettes, avant de passer aux dépenses en principe la semaine prochaine. Un vote solennel est prévu le 12 décembre.”Pour la première fois depuis au moins sept ans et sans doute une dizaine d’années, il y a une claire majorité au Sénat pour accompagner et pour soutenir – sans complaisance mais de manière positive -, l’action du gouvernement”, a insisté ces derniers jours Michel Barnier.Ce budget “est perfectible et nous comptons évidemment, plus que sur toutes autres, sur les discussions qui vont avoir lieu dans cet hémicycle pour en améliorer le contenu”, a lancé le ministre de l’Economie Antoine Armand, en ouverture des débats à la chambre haute.Premier signe positif pour le gouvernement: les sénateurs ont adopté en parallèle le projet de loi de finances de “fin de gestion” pour 2024, un texte moins emblématique qui fixe d’ultimes ajustements budgétaires en fin d’année.D’autres mesures plus sensibles arrivent néanmoins dans le budget 2025, comme la “contribution exceptionnelle” sur les bénéfices des grandes entreprises ou sur l’imposition minimale demandée aux ménages les plus aisés pendant trois ans. Deux dispositifs loin d’être dans l’ADN de la droite.- “Socle” divisé -La chambre haute entend également poser quelques marqueurs en disant non à l’augmentation de la taxe sur l’électricité, et surtout en réduisant la contribution demandée aux collectivités territoriales, toujours choyées dans cet hémicycle.”L’effort de 5 milliards d’euros n’est pas envisageable. Nous souhaitons le limiter à 2 milliards et réaliser les 3 milliards d’économies ailleurs”, a promis le président du Sénat Gérard Larcher devant le Congrès des maires de France.La gauche, minoritaire, ne manquera pas, de son côté, de s’indigner face à ce qu’elle qualifie de “renoncement”. Signe que les rapports de force diffèrent dans les deux chambres: le Sénat a rejeté un dispositif proposé par le macroniste et ex-socialiste Xavier Iacovelli pour défiscaliser la pension alimentaire reçue par le parent ayant la garde de l’enfant, tout en supprimant l’avantage fiscal dont bénéficie celui qui la verse. Cette mesure, favorable aux familles monoparentales, avait été approuvée fin octobre à l’Assemblée grâce aux voix de gauche – avant que le budget, dans son ensemble, y soit rejeté.Autre divergence entre les deux chambres: le Sénat a rejeté l’idée de transformer en crédit d’impôt la réduction fiscale sur les frais de séjour en Ehpad, ce qui aurait permis aux plus modestes d’en bénéficier également. Là aussi, la mesure avait précédemment été approuvée à l’Assemblée.Le “socle” gouvernemental s’est par ailleurs divisé sur une proposition vinant à taxer d’avantage les retraités, en abaissant le plafond de leur abattement de 10% – ce qui aurait donc surtout frappé les contribuables les plus aisés. La mesure, qui aurait pu rapporter deux milliards d’euros mais n’était pas soutenue par le gouvernement, a été rejetée: les sénateurs LR ont voté pour, mais la plupart des centristes étaient contre.Après le Sénat, sept députés et sept sénateurs tenteront de trouver un compromis sur le budget lors d’une commission mixte paritaire (CMP). S’ils y parviennent, la version finale du texte semble promise au 49.3 à son retour devant les députés. Et donc à une motion de censure examinée autour du 20 décembre.